mercredi, décembre 14, 2005

Jour 9 : Douz (20 juillet 2005)

Réveil matinal à nouveau pour moi, et cette fois pour une raison purement technique : ma vessie demande la permission de sortie. J'hésite, je ne sais pas trop, pas trop rassurée si mes amis sont endormis, on ne sait jamais ce qui peut se produire. Je trouve un endroit qui finalement ne me convient pas ; et s'ils se réveillaient et que l'un deux ait la même idée? Ca m'ennuierait vraiment qu'il décide de prendre la même direction que moi, je préfère donc patienter.
J'attends le petit déjeuner, c'est-à-dire que tout le monde soit levé et me voit partir seule, pour m'éloigner du camp. Arrivée à bon port, je me retourne pour vérifier que personne ne m'ait suivie et entends soudain des cris d'animaux furieux.
Baston de dromadaires! J'ai juste le temps de me décaler de quelques centimètres pour avoir une meilleure perspective : Mongi déboule alors de nulle part dans une course effrénée, pieds nus sur le sable, et se jette pieds en avant sur le chameau indocile qu'il frappe en pleines testicules.
Dire qu'à une seconde près je ratais cet incroyable moment! Je finis mon affaire rapidement et rejoins le reste de la bande. On repart illico. La veille il m'a semblé gérer plutôt bien la balade, j'ai même entendu (ou cru entendre) les chameliers dire que je me débrouillais pas mal, mais aujourd'hui les courbatures se font sentir et, surtout, je suis encore au réveil.
Mais visiblement nous avons dû prendre du retard car les dromadaires sont pressés par les guides, et les voilà même qui commencent à courir! Pas très à l'aise en début de chevauchée, je commence à éprouver un instant de panique : je suis en tête de convoi, en cas de chute, quatre dromadaires galopant derrière moi sont prêts à me passer sur le corps.
Mais le calme revient rapidement et nous reprenons notre rythme de croisière. Retour à Douz où nous nous reposons de notre méharée dans le chaleureux hôtel qui nous avait accueilli la veille.

Jour 8 : Douz (19 juillet 2005)

MAIL FROM : Shiva
Non, en fait, t'as raté ton avion et t'es restée à Paris et tu te fous de nous avec tes histoires hallucinantes et Steff (petit naïf qui croit que Claire Chazal est vraiment blonde) a tout gobé; mais on ne m'aura pas comme ça: après une semaine au Sénégal, je sais que tu serais rentrée dès le premier jour, après le ptit déj dans l'auberge au silence assourdissant; et même dès le coup du bus à 22h : tu n'es pas psychologiquement en condition pour nouer une quelconque amitié avec des scouts et encore moins avec Mike (le Canadien); tu n'as pas terminé ta formation Jedi et un petit Padawan ne tiendrait pas plus de 2 secondes ces épreuves incroyables. Alors, non!
Si t'es vraiment dans la suite de galères (que tu as tout de même l'air d'apprécier et de trouver marrant, petite maso) que j'imagine, sache que ce n'est pas bientôt fini et que ça va crescendo: rentre à la maison!!! Je te ferais des merguez et t'arnaquerais pour que tu te sentes pas dépaysée!
Non, en fait, amuse-toi bien on se fait chier comme des rats pourris à Paris, à Royan, bref partout où je suis (c'est moi qui fous la zone ou quoi? )
biz
Shiva

Le lendemain matin est plus gai. Réveillée la première, je discute avec Igor qui se révèle être un homme très intéressant : curieux de tout, il se cultive dans différents domaines et nous apprend beaucoup. Les autres finissent par se lever pendant que nous prenons notre petit déjeuner. Ma mauvaise humeur est passée, une nouvelle journée commence.
Je dois aller à l'hôtel Saharien Paradise pour remettre un guide au directeur de l'établissement ; je sais qu'il n'est pas là mais je tiens à lui remettre un exemplaire en remerciement de son hospitalité l'année précédente. Nous déjeunons sur place et profitons de leur jolie piscine pour barboter un peu. Je ne me mouille évidemment pas. Pas de maillot avant d'avoir un poids raisonnable, et c'est pas demain la veille.
Nous rentrons tôt car on a rendez-vous avec le directeur de l'hôtel où nous logeons : on part pour le désert, passer une nuit à la belle étoile! J'ai déjà fait ça l'an dernier, mais la balade à dos de dromadaire est une première et cette perspective me réjouit autant que mes petits camarade.
On part en 4x4 rejoindre ce qui est, littéralement, la porte du désert. Une grande arche, El Bab, surplombe la route qu'elle sépare sur sable sahélien. Enfin, nous y sommes! les dromadaires nous attendent ainsi que deux Bédouins, Taha et Mongi. je suis la dernière à monter car Mongi, un jeune Touareg aux yeux très clairs, insiste pour faire un cheich de mon paréo. Voir les quatre autres s'élever si haut dans les airs ne me rassure pas vraiment.
Je ne me rendais pas compte jusque-là qu'un chameau est nettement plus grand qu'un cheval, impensable de le monter debout.
Mais tout se passe bien, le camélidé se lève prestement et entame sa marche lancinante. Mon chameau est le chef de troupe, ce qui signifie que je suis devant les autres pendant tout le trajet. Malgré les tentatives de certains de mes congénères, il restera jusqu'au bout le guide du petit troupeau. J'aime cette position bien qu'elle ne me permette pas de voir mes amis : j'ai le désert à perte de vue et j'ouvre la route.
J'aimerais bien avoir quelqu'un à mes côtés mais c'est impossible, un groupe ne peut avoir qu'un meneur, sinon c'est une scission qui s'annonce. J'ai la sensation que cette règle de vie naturelle chez les chameaux n'est pas étrangère à notre mode de fonctionnement : des rapports donnés entre nous qui ne souffrent pas de transgression sous peine de voir chanceler l'équilibre du groupe. De toutes manières, j'ai l'impression que la confiance que tous me donnent m'a déjà mise à un rang que je n'ai pas sollicité et qui, bien que flatteur pour l'amour-propre, induit un mur entre eux et moi.
Ce n'est pas tant le fait que je sois la seule fille, car je crois bien qu'à ce niveau-là, ils me considérent comme l'un des leurs. Ni la différence de langue (l'anglais et le slovène sont les langues prédominantes entre nous et je n'ai pas les compétences linguistiques pour m'exprimer librement en anglais) qui, si elle m'isole plus encore, n'est pas le déclencheur de cet état de fait.
Je crois que c'est mon "statut professionnel", le fait que je sois déjà venue parcourir ce pays en profondeur. Avec le recul, la personne avec qui j'ai eu la relation la plus naturelle est Alech, qui n'a appris que je n'étais pas là en vacances la veille de son départ. Je sais que Jon y accorde une importance certaine et je ne sais pas si je dois la prendre en compte dans son attitude vis-à-vis de moi.
Nous avançons dans le désert et Mongi demande à Jon d'où nous venons ; étourdiment, celui-ci répond que nous nous sommes tous rencontrés en Tunisie. Il devrait pourtant savoir à présent qu'il ne doit pas me présenter comme une femme seule car cela signifie disponible ici. Je ne suis plus très rassurée maintenant, et effectivement le jeune Touareg commence à me parler, me questionner pendant toute une partie du trajet. Constatant enfin que mon arabe est très limité, il finit par retourner auprès de son ami.
Nous faisons une pause pour quelques instants où la descente de dromadaire se révèle particulièrement périlleuse. Mongi me rattrape dans ses bras, ce qui m'agace d'autant plus que je m'en sortais très bien sans lui, et nous pouvons enfin admirer le paysage. J'en profite pour annoncer à Matt que nous sommes officiellement mariés, chose que nous ébruitons assez largement tout le reste de la journée. Mais je passe la majorité de mon temps avec Jon et les guides ne sont pas dupes.
Le campement sous tentes bédouines est sympathique mais nous préférons dormir dehors, à la belle étoile. Matt met de la musique assez fort pour que tout le monde puisse en profiter et nous restons là, allongés sans rien dire. Je n'aime pas trop l'idée d'écouter de la musique quand on pourrait apprécier le silence sahélien, mais l'intention compte plus que l'acte. Nous sommes ensemble, partageant un moment unique dans notre expérience et pour moi ça vaut tous les silences du monde.

Jour 7 (bis) : Kebili-Douz (18 juillet 2005)

Kebili, changement ultime vers Douz : on se regarde, ne parlons pas trop vite, ici tout peut arriver et généralement pas ce que l'on souhaitait. Mais on trouve rapidement un louage, enfin après avoir attendu que Jon finisse de discuter avec un énième inconnu qu'il ne reverra jamais. Ce type a une capacité extraordinaire à attirer les gens et il aime ça. Je me dis que la cohabitation va être difficile, j'ai horreur de perdre du temps à des futilités. Les gens ici aiment poser les mêmes questions, à l'infini, ces questions qui ne veulent rien dire mais demandent une bonne dizaine de minutes d'attention que je n'ai pas. Je suis fatiguée, je veux rentrer, me poser dans une chambre, prendre une douche, arrêter ce cycle infernal attente/louage/attente. Je m'exaspère, il ne comprend pas, je passe probablement pour une sociopathe mais ça m'est égal.
Nous trouvons enfin une voiture mais il faut payer les trois places restantes ; on n'hésite pas trop, tout le monde est épuisé. Quelques instants plus tard, le chauffeur nous demande où nous déposer "Hôtel la Tente s'il vous plaît""Vous allez dans le désert?" Aïe, je n'aurais jamais dû laisser Jon tout seul avec le chauffeur, le voilà parti dans une conversation dont il ne mesure pas encore les conséquences. je tends l'oreille mais ne perçois rien et j'enrage.
Bien entendu, le louage s'arrête devant un autre hôtel - où le chauffeur a une commission- et nous voilà immédiatement entourés d'une flopée de guides. "Tu veux aller dans le désert?" "Moi, c'est pas cher!" "Tu connais l'hôtel Merzaoui?"
Je suis assez remontée contre Jon mais ne laisse rien paraître. Sa confiance en l'humanité n'est pas à mettre en cause. Et puis, cela pourra peut-être lui apprendre à se méfier à l'avenir.
Je finis par devenir grossière avec ces jeunes gens, récupère mon petit monde et on se dirige vers notre hôtel. Négociation des tarifs et repos bien mérité dans les chambres. La nôtre a la clim', ce qui est d'autant plus comique qu'Igor a parlé toute la journée d'air conditionné et que nous avons refusé son choix d'hôtel (climatisé donc) car il coûtait trop cher.
L'hôtel est fort agréable. Les chambres du premier étage sont dotées de jolis plafonds de brique en forme de voûte et disposées autour d'une terrasse très appréciable une fois la nuit tombée. Il n'est pas pensable d'y demeurer la journée, il y fait tellement chaud qu'il est impossible d'y rester pieds nus.
Je commence à vraiment apprécier la compagnie de mes petits potes de voyage. Les Slovènes en particulier sont très drôles : d'abord un peu froid, voire renfrogné, ils se sont finalement révélé très chaleureux et dotés d'un sens de l'humour très aiguisé. Matt et Jon sont aussi adorables et vraiment amusants, mais c'est différent, surement parce qu'ils se sont trouvés dans ce voyage et que j'ai parfois l'impression d'être de trop avec eux. Les frères sont, à mon avis, plus ouverts sur les autres parce que c'est précisément nous qu'ils découvrent. J'aime notamment l'humour absurde d'Alech et je suis triste qu'il reparte dans deux jours en Slovénie. Il me demande combien de temps il me reste en Tunisie. Je calcule rapidement "Quatre semaines". Je ne réalise pas alors que je suis dans l'erreur et qu'il ne m'en reste que trois, mais cette découverte me choque profondément. Comment c'est possible? Je ne vais pas réussir à tenir quatre semaines seule dans ce pays de fous! Je me suis tellement habituée à leur présence rassurante à mes côtés, comment me faire alors au fait de me retrouver toute seule?
Je vais me coucher, je suis trop triste pour penser à rien, je ne veux plus les voir en sachant qu'ils vont bientôt me quitter. J'ai envie de pleurer et je leur en veux de m'abandonner.
Je sais pertinemment que c'est égoïste et injuste mais la déception prend le dessus. Quand il décident de sortir manger, je ne les accompagne pas et reste sur la terrasse à ruminer mon sort comme un rat en contemplant le ciel. La soirée est longue, ils rentrent tard avec du vin, des bières, et surtout une cohorte de 30 adolescents qui a envahi l'hôtel. Je commence à ressentir de puissantes envies de meurtre et envoie sévèrement promener Jon qui a eu la malheureuse idée de passer par la chambre. Longue nuit en perspective...

Jour 7 : Gafsa-Metlaoui-Tozeur-Kebili (18 juillet 2005)

La matinée est dévolue à mes tentatives de faire se lever ces marmottes pour parvenir à temps à Metlaoui. Nous voulons prendre le Lézard Rouge, ancien train minier dédié à l'usage exclusif du bey de l'époque et dont la constructions des voies (en plein coeur d'un canyon inaccessible autrement) a été probablement une des plus grandes folies du pays. Mais pour cela, il ne faut pas rater l'heure de départ du train qui ne part qu'une fois par jour.
Nous arrivons largement à temps, plus d'une heure en avance, et je me sens un peu embarrassée d'avoir bousculé tout ce petit monde à une heure si matinale. Mais les deux frères ont vite fait de me mettre à l'aise en se moquant exagérément de mon manque de jugeotte.
Le train se meut enfin, et l'on traverse doucement les gorges de Selja. C'est assez impressionnant ces canyons séculaires traversés par des rivières de phosphate noir. On dirait du pétrole émanant des entrailles de la roche. Arrêt à Redeyef, au bout de la ligne, en plein coeur de l'aridité sahélienne ; bêtement, je n'ai pas pensé à vérifier ce détail, et je n'ai pas imaginé une seule seconde que ce stop en rase campagne pouvait constituer un réel point de départ pour une destination passionnante : les oasis de montagne. Nous reprenons donc naturellement le chemin du retour au long rythme lancinant de cette miniature de l'Orient-Express. Les oasis de montagne sont une originalité de la région : trois villages de crête s'accrochent à la roche, l'agrémentant du vert de leurs palmeraies. un spectacle sans aucun doute époustouflant, mais auquel je n'aurai pas le plaisir de goûter.
On va vers Tozeur maintenant, pour finir à Douz, si les dieux des louages nous accompagnent. Alech, le plus jeune des frères slovènes, s'arrête pour acheter une bouteille d'eau et ressort avec une multitude de friandises :"le vendeur m'a donné ça en disant que j'étais maintenant son meilleur ami en Tunisie"...
Louage trouvé et nous repartons aussi vite que nous sommes arrivés. En revanche, Tozeur nous fait attendre, attendre, attendre encore et toujours attendre. On nous a posés là dans un coin de la station en attendant de trouver trois autres personnes pour Douz. Certains dorment, d'autres jouent au football, les autres enfin lisent. Au bout de près de deux heures d'attente pendant lesquelles personne n'est venu étoffer l'intérieur de notre louage, nous décidons avec Jon de vérifier si aucun bus ne pourrait couvrir la liaison. Une chance, la station est à peine à 20 mètres de là. Je tente une escapade méritée vers les toilettes de la gare, tentative immédiatement avortée en raison de l'état déplorable de celles-ci : comme si une nuée de malades s'était donné rendez-vous pour rejeter de leurs corps et par tous les orifices possibles l'intérieur de leur organisme sans tirer la chasse.
J'ai bien failli tourner de l'oeil mais me ressaisis et rejoins Jon qui s'enquiert des horaires de bus pour Douz. "Désolé mais le dernier est parti il y a un quart d'heure à peine." Ouh là, ça sentirait pas comme une bonne journée de galère, là? En tout cas, ça en a clairement la saveur.
On repart dépités, et avant même qu'on ait eu le temps d'annoncer la mauvaise nouvelle, les autres se jettent sur nous : "c'est bon, on part, dépêchez-vous!" En effet, le chauffeur du louage voyant que nous nous dirigions vers la solution bus, a probablement pris peur de perdre une clientèle nombreuse et préfère nous amener à 5 (au lieu de 8) sans supplément jusqu'à Douz. Fort heureusement pour nous, il n'avait pas en tête les horaires de bus.
Cependant, tout cela est sans doute trop beau pour être vrai, je l'interroge donc une dernière fois afin de mettre au clair les termes de notre accord avant de monter en voiture. "Oui, prix normal, pas de supplément pour Kebili." Kebili? Comment ça? Pas Douz? On va encore devoir changer de véhicule, mais je n'ai plus la force de négocier quoi que ce soit.
Je voulais montrer le Chott El Djérid à la fine équipe, mais il commence à se faire tard et la blancheur scintillante risque de se transformer en roseur somme tout banale. J'ai peur d'avoir trop parlé, de manière trop enthousiaste en tout cas, c'est une évidence. En effet, ils m'ont l'air un peu déçu. C'est normal, le chott n'a là rien d'impressionnant, c'est une simple surface plane qui s'étend des deux côtés de la route, rien de plus. Je suis un peu triste ; je n'y suis pour rien mais j'ai la sensation de les avoir trahis. le chott me déçoit, je ne le regarde même plus.

Jour 6 : El Kef-Gafsa (17 juillet 2005)

Réveil matinal le lendemain matin. J'ai du mal à me lever tard en voyage, et j'en profite pour réveiller les autres après un rapide tour de la ville (on est dimanche, tout est fermé ici). Ce n'est pas évident parce qu'ils ont le sommeil lourd mais je persévère et finis par obtenir gain de cause. "Juste le temps d'un café et on décolle." Chose surprenante, personne ne se plaint et je dois même avouer qu'ils sont plutôt vite prêts.
On se balade à travers la ville pour trouver la station de louages et descendre à Gafsa. El Kef est plutôt une jolie ville, comme on le pressentait la veille, mais c'est plus facile à constater en journée. Cette fois, l'accueil est plutôt froid et les rares commerçants ouverts n'apprécient pas du tout notre intrusion. On se fait arnaquer deux ou trois fois avant de prendre définitivement le large.
Dans le louage, c'est devenu un peu une habitude, les Slovènes sont ensemble sur un siège à deux places et nous autres nous glissons à l'arrière, juste derrière eux, sur la triple banquette. Matt est amusant et plein d'une vitalité phénoménale. Quand il ne dort pas. C'est assez ennuyeux d'avoir des voisins dormeurs sur d'aussi longs trajets, mais je ne peux pas les réveiller pour mon bon plaisir. D'autant que Matt a la gentillesse de me prêter régulièrement son Ipod, ça me permet de passer le temps.
On arrive enfin à Gafsa, assez tôt dans l'après-midi pour se balader à la recherche des monuments historiques de la ville : des piscines romaines que le Lonely Planet affirme être pleines et que le Petit Futé promet vides et inutilisables. C'est un peu la guerre avec Igor qui clame haut et fort que mon "shitty guide" n'arrive pas à la cheville du sien, et c'est vraiment une question d'honneur pour moi que de trouver ces piscines totalement asséchées. Evidemment, avec la chaleur qu'il fait ici, on préfèrerait tous pouvoir s'y baigner, mais mon honneur sera sauf et la douche indispensable, car les ruines de Rome sont absolument tout sauf des piscines. On est donc tous un peu déçus, mais j'ai tout le même le grand privilège de charrier Igor sur tout le chemin. On arrive près de la palmeraie et nous décidons de la parcourir, pour une fois que l'on en croise une. Gafsa est une vraie ville du Sud, c'est la première sur notre trajet, alors on en profite pour découvrir les sinuosités de son oasis. On s'y perd avec délectation sans prendre garde de l'heure qui tourne et du soleil qui se couche. En plein coeur de la palmeraie, on rencontre, à ma grande surprise, un couple de Tunisiens qui vivent là, dans leur maison à ciel ouvert avec leur enfants. Ils nous invitent à prendre un verre de thé, goûter les figues de Barbarie et discuter un instant. Les garçons acceptent avec chaleur, je suis déjà plus circonspecte mais je comprends que mes compagnons de voyage aient envie de connaître l'hospitalité tunisienne, surtout offerte de si bon coeur. J'ai seulement horreur qu'on me pose ces éternelles questions d'où tu viens, où vas-tu, qu'est-ce que tu fais...
Celle que j'avais oubliée, la fameuse question -comme quoi on perd vite les bonnes habitudes- c'est celle du mariage. J'avais pourtant tout bien préparé, ma bague de pacotille devant servir d'alliance, des mensonges éhontés sur mon époux m'attendant dans la prochaine ville... Rien à faire, le confort rassurant de ce voyage en groupe (concept tout nouveau pour moi) m'a totalement fait oublier les précautions de base. Résultat, je me retrouve à me voir proposer la main du fils aîné pendant que mes adorables compagnons acceptent volontiers un second verre de thé! On finit par rentrer avec l'aide du père et du fils (la palmeraie est dangereuse de nuit visiblement) et ce dernier me propose tout de même de passer la nuit chez eux, offre que je décline le plus poliment possible. Après cette soirée pleine de surprises, on décide de prendre les devants et, Matt étant le seul à porter une bague, il accepte de me servir de mari virtuel pour nos prochaines rencontres délicates. On retourne enfin à notre hôtel où je reste seule, cette journée m'ayant coupé l'appétit, pendant que les autres vont se sustenter. Mais la porte de la chambre ne ferme pas, je ne pourrais donc pas fermer l'oeil avant leur retour. Vivement demain!

Jour 5 : Tabarka-El Kef (16 juillet 2005)

La journée s'est révélée mouvementée mais bien peu fructueuse. malgré nos quelques heures d'attente, d'allers-retours et de coups de fil inutiles, on se voit dans l'obligation d'opter -comme s'il y avait une alternative- pour la solution louage.
On se dirige donc lourdement, lentement et avec peu de chances d'y parvenir, vers la station de louages. "Pas possible d'aller à El Kef, il est trop tard là, il faut changer à Jendouba." Merveilleux. S'il est trop tard maintenant dasn cette capitale de région qu'est Tabarka, qu'en sera-t-il dans une heure lorsqu'on sera coincés dans une petite ville de province... On s'interroge mutuellement du regard ; sans trop y croire, on monte en voiture.
Quatre heures et plusieurs changements plus tard, nous voici enfin à El Kef. Rien d'extraordinaire ici, si ce n'est l'absence totale de touristes et la curiosité avenante des enfants envers ce groupe de tortues humaines transpirant de fatigue.
L'hôtel est plutôt agréable, quoique fort simple. Nous sommes au sein de la médina et j'adore ça ; ses ruelles en pente aux sinuosités si bien pensées qu'elles en sont incompréhensibles pour les Béotiens que nous sommes.
Première peur, vont-ils m'obliger à prendre une chambre pour moi toute seule? Je suis une femme, arabe de surcroît, voyageant avec quatre Gaouri... Mais non, ça passe comme une lettre à la poste. Je me dis que si ça fonctionne en plein coeur du pays, là où les traditions sont toujours fortement ancrées dans les moeurs, je n'ai pas vraiment à m'inquiéter pour le reste du voyage.
Ce soir je dors avec Jon (le Canadien) et Matt (l'Australien), Igor et Alech, les frères Slovènes, occupant une autre chambre. On est vite à l'aise avec eux : je ne connais pas encore les Slovènes et ils ne parlent pas beaucoup, ou alors en slovène, ce qui n'aide pas, mais je me sens bien dans ce groupe improvisé.

MAIL TO : Tout le monde
L'avantage de partir à plusieurs c'est que, dans le lot, il y en a bien un ou deux qui ont leur permis de conduire. On décide donc naturellement de prendre une voiture de location pour se diriger vers le Sud, vu que ça a l'air particulièrement compliqué de le faire autrement.
On va donc à l'agence de location Hertz, mais elle est fermée. Direction la concurrence qui nous confirme que seule la première agence (sur les quatre que nous avons faites au total) nous permet de descendre de Tabarka et de déposer la voiture dans une autre ville. Ca commence bien...
En fait, je dois admettre que, si on avait été légèrement moins bornés, on aurait vu là un signe qui ne trompe pas, celui de la galère.
On a attendu quatre heures, téléphoné sur le portable du type qui, théoriquement, devait travailler mais en fait fait sa sieste, téléphoné encore à son collègue qui est à Tunis, vu que lui ne travaille pas... Bref, bonne ambiance. Le gars de Tunis finit par rentrer, ravi d'écourter ses vacances pour nous ; je me jette sur lui et lui propose de "tester" une de ses caisses mais seulement à un prix raisonnable. Il était sur le point d'accepter quand quatre personnes sont venues faire la queue derrière moi pour louer la seule voiture qui restait, en l'ocurrence celle que je prenais.
Bien sûr impossible alors de baisser le prix, tout était à refaire, et j'ai rarement vu un homme aussi heureux de rater un deal. J'étais verte. Et crevée de porter mon sac à dos.
On a fini par prendre un louage tardif, qui n'allait donc, forcément, pas à la destination que nous souhaitions, vu que nous étions déjà en fin d'après-midi, et on a fait quelque chose comme trois changements pour 70 kilomètres. Trop cool.
Mais ça nous aura au moins permis de passer par les montagnes de la Tunisie Occidentale où, si les routes sont particulièrement tortueuses et donc trois fois plus longues, le paysage de forêts et de vallées verdoyantes était magnifique. On a même failli avoir le coucher de soleil... Mais en fait non.

Jour 4 : Bizerte-Tabarka (15 juillet 2005)

MAIL TO : Tout le monde
Réveil matinal à 6 heures. Je ne sais pas si c'est la peur de recroiser un gamin ou le manque de caféine, mais j'ai vraiment besoin de sortir d'ici. Je fais mes affaires pour rejoindre Bizerte au plus vite et pars comme un voleur super content. Finalement Bizerte est plutôt une jolie ville, mais surtout au niveau de la vieille ville et du vieux port. Je me fais payer des coups par une femme qui tient un café mixte (où les femmes ont la permission de s'assoir en gros) et visite la galerie d'artisanat d'une autre femme vraiment douée et dont les poteries sont (enfin!!) très originales. Je repasserai à la fin de mon séjour pour lui en prendre quelques unes.
Je recherche un publinet pour donner et prendre de vos nouvelles, malheureusement je trouve porte close partout. Tant pis, j'irais à Tabarka. Je voulais partir plus tard mais je n'ai plus rien à faire, alors hop, direction la station de louages.
Pour la première fois dans ma (grande) expérience de la Tunisie, on me dit qu'il n'y a pas de louage pour cette ville, qu'il faut que je fasse un changement ; honnêtement, j'y crois à moitié et ça se voit. On m'explique donc une deuxième fois, vu que je suis un peu attardée, et je finis par me laisser convaincre. Grande idée ! J'ai rarement fait 100 kilomètres en 5 heures et quatre louages différents. Au bout d'un long, très long moment d'attente dans une énième ville, un chauffeur de louage a eu pitié de moi et m'a payé un louage entier (normalement c'est pour 8 personnes) pour que je rejoigne, toujours pas Tabarka, mais la ville la plus proche. La honte. J'avais vraiment l'impression d'être entrée dans la 4ème dimension, comme si plus rien d'autre que ce binôme trajet/pause-dans-un-endroit-désert-mais-néanmoins-inquiétant n'avait survécu sur la Terre. Comme si tous mes anciens repères s'effaçaient doucement mais surement à mesure que l'on s'enfonçait d'avantage dans ce royaume de l'absurde.
On a pourtant fini par arriver à Tabarka la merveilleuse dixit le guide, les habitants, les touristes etc... Pour moi c'est une ville comme une autre avec une marina et un fort espagnol, mais surtout un endroit extrêmement cher et donc beaucoup moins sympa, du coup.
Son grand avantage est que j'ai eu la chance d'y prendre le même hôtel hors de prix que les personnes que je devais retrouver, et franchement, ça fait plaisir. On est donc cinq maintenant, deux Slovènes, un Canadien, un Australien et moi, quatre continents en un simple groupe de personnes. C'est plutôt cool. Maintenant ce qui serait encore mieux, c'est qu'on ne trouve plus aucune télé jusqu'à ce qu'on se sépare ou au moins juqu'à la fin du Tour de France.


MAIL TO : Najet
Chuis désolee, c'était trop la merde aujourd'hui, enfin rien de méchant, mais j'ai beaucoup voyagé et impossible de trouver un publinet ouvert avant maintenant, c'est relou grave. Tant pis pour l'appareil photo mais je préfère ça que ma pochette avec tout dedans, et qui était dans le même sac!!! et là tu peux dire qu'ils sont vraiment cons ces mecs. mdr!!!
J'ai enfin retrouvé le Canadien, donc je vais pouvoir souffler: on s'était filé rdv à douz et ça avait l'air trop galère pour y aller, mais maintenant qu'on est tous les trois (avec l'Australien) à Tabarka, ça va être plus marrant, à défaut d'être simple. hihihi
Mamou te racontera, mais je suis déjà crevée. comme quoi c'est pas gagné avec mon poids. Mais ça va. J'ai juste peur parce que je me dis que je ne suis là que depuis mardi et que j'ai encore quatre (quatre?????!!!!!!) semaines à tenir. J'en suis presque à compter les heures hahaha!
Je me sens pas d'envoyer un mail collectif vu que je réponds à tout le monde, mais je vais tenter quand même.
Bisous et bon courage avec papa, tu m'as bien fait marrer, faudra que tu me racontes tout ça en détail. Je suis dans un hôtel dont je ne me souviens pas le nom et qui est super cher pour l'hôtel le moins cher de la ville. Ca me gave un peu, mais bon, pas le choix et surtout trop crevée. je cherche le nom depuis tout à l'heure, mais rien à faire. de toutes manières je le quitte demain, donc...
bisous
mousse qui pete n'amasse que des miettes

Jour 3 : Tunis-Bizerte (14 juillet 2005)

MAIL TO : Tout le monde
Après les derniers évènements, je dois avouer que je m'attache de moins en moins à Tunis, mais je m'en fous parce que je pars le jour même, et c'est suffisant pour me rendre le sourire.
Je prends un dernier verre avec mes copines allemandes de l'auberge dans un silence étourdissant, rien de mieux pour me remotiver.
Programme : Bizerte(NE), puis Tabarka(NO), pour finir à Douz(S) où j'ai rendez-vous avec le Canadien, que j'ai également rencontré à l'auberge, pour faire du dromadaire dans le désert. Ca me fait trois jours chargés mais je suis un warrior, un vrai de vrai.
Je repère sur un plan où je dois me rendre pour prendre mon taxi-louage pour Bizerte : c'est à peine à quelques centaines de mètres de la médina, je gère tranquille. C'est seulement au bout de trois quarts d'heure de marche sous un soleil de plomb que je commence à me demander si c'était pas un peu loin finalement. Bref, je m'endors comme un gros rat sur mes voisins pendant le trajet (en tenant toujours très fort mon sac, maintenant que ça ne sert strictement à rien) et me réveille dans un endroit trop pas joli du tout alors que ça devait super pittoresque à mort. Je suis un peu déçue, mais je me reprends, direction l'auberge de jeunesse : il y en a deux, le choix est vite fait vu que je repars le lendemain, hop celle du centre-ville. Pas de bol, c'est complet, y'a des gamins qu'ont réservé toute l'auberge. C'est pas plus mal que je me dis, et reprends un taxi (ben justement, je savais pas trop quoi faire de mes thunes) pour aller à celle qu'est super sympa mais à 20 kilomètres.
Voilà-ti pas que cet abruti me traîne dans un centre de stage et de formation des jeunes !!! Ils font aussi auberge et ont plein de chambres de libres, j'ai plus aucune excuse, je reste.
Je crois bien avoir attendu 2 heures et quart sous le soleil que le directeur daigne venir et donc apporter par la même occasion le trousseau de clefs. Me suis couchée direct et le gars de la réception me réveille en tapant comme un dératé à ma porte : Mademoiselle, il y a un problème? ça va? Je lui ai hurlé de dégager, rien à faire, il voulait que j'ouvre ma porte. Au bout de cinq minutes de gueulage, foutu pour foutu, je lui ouvre, mais alors particulièrement remontée... "Vous voulez pas manger?" Je l'ai regardé, j'en croyais pas mes oreilles. J'en ai presque oublié de l'engueuler. Résultat, j'ai fini par sortir et me faire traîner dans la soirée de fin de stage d'un groupe de gamins et de boys scouts jumelés avec les scouts d'alsace (ben ouais, y'a pas de raison pour que je sois la seule à avoir droit à ce genre d'informations!!!). C'est cool parce que j'avais pas franchement envie de dormir plus de trois heures cette nuit-là.
Voilà, je sais, c'était long et pas très intéressant, mais c'est assez représentatif de ma journée je trouve.

Jour 2 : Tunis (13 juillet 2005)

Ce matin, douche et travail dans le patio ; je ne comprends pas très bien pourquoi je suis la seule levée mais m'en accomode, chacun son rythme. Tiens, Alexis... Alexis?!! Mais quelle heure est-il?? Debout à 6 h, c'est mon père qui serait fier de moi s'il me voyait. Tant mieux, je profiterai d'autant plus de ma journée.
D'abord, publinet, pour informer mon entourage que tout va bien, l'avion ne s'est pas crashé, mon portable ne fonctionne évidemment pas, mais je suis encore en vie.

MAIL TO : Mamou
Merci mamou pour ton très gentil petit message,

Je suis dégoutée, aujourd'hui je me suis fait piquer l'appareil photo d'alex, dans la medina... pourtant j'ai fait gaffe, mais rien à faire. j'en ai déjà marre, mais bon,, je savais bien que cette médina puait. C'est bien, ça donne envie de revenir.

Bref, un peu déprimée pour le coup, mais je vais bouger ce soir à bizerte, alors je m'en fous, je quitte cette sale ville pourrie, c'est déjà ça. Je te fais un gros bisou et je suis bien contente que tu ailles mieux, c'est cool.

MAIL TO : Tout le monde
Hier était une journée sans grand intérêt ; j'ai visité quelques hôtels pourris et oublié de faire la moitié des choses que j'avais à faire. Grand moment de solitude en retournant dans la medina où j'ai mis près d'une heure pour retrouver l'auberge de jeunesse : au moment où j'y arrive enfin, je me rends compte que je suis revenue à mon point de départ. Ce qui, entre parenthèses, est particulièrement agaçant quand on a vraiment envie pisser. Tout à l'heure je vais devoir y retourner et je commence déjà à me préparer psychologiquement pour mon trek medinesque : un mix de zen attitude et une bonne giclée de kung fu fighting. D'autant que ce matin, il y a genre une heure, je me suis fait subtilement taper mon appareil photo (celui d'alex plus précisément). Franchement, ils sont doués, faut reconnaître : ouvrir mon sac, ouvrir la sacoche de l'appareil et prendre l'appareil sans que je me doute de rien, je trouve ça assez fort... Voire un peu stupide parce que c'était quand même nettement plus rapide d'embarquer la sacoche, mais bon, chacun sa techique je suppose. Bref, j'en étais à mon troisième poste de police quand je me suis arrêtée pour faire une pause internet. C'est marrant, autant le vol en lui même ne m'a pas plus traumatisée que ça (je t'en rachèterai un autre, nalesque! promis! et un mieux!), autant me balader d'un commissariat à l'autre a failli me rendre folle. Déjà parce que le simple fait d'y mettre un pied me saoule un peu, mais si en plus je dois tous les faire... Bref, la journée commence bien, il va y avoir du sport.

Jour 1 : Tunis (12 juillet 2005)

18h30 : Débarquement à l'aéroport de Tunis-Carthage. On me jette là sur le tarmac avec pour seules instructions "Passez un bon séjour". En cette fin d'après-midi de juillet, l'air est agréable, une légère brise apporte un peu de fraîcheur.
J'attends le bus qui me conduira à Tunis, stoïque face à la horde de chauffeurs de taxi qui se succèdent auprès de moi. Mon sac à dos sur les épaules, j'ai du mal à passer pour autre chose qu'une Gaouria ; j'ai pourtant le profil basané d'une bonne maghrébine pure souche mais mon look me trahit, avant même que j'aie pu tenter de montrer patte blanche.
"Je te fais un prix, 5 DT pour Tunis!" Je rigole, mon bus me coutera 600 millimes, le dixième de ce qu'il me propose. Je refuse. "Comme vous voulez, le prochain est à 22 h" Je le regarde, effarée. Mince, y'a des gars qui n'ont peur de rien. Que ne ferait-on pour 5 dinars ! C'est précisément la question...
Bien entendu, le bus arrive 30 secondes plus tard pour m'emmener à Tunis. 1 DT me dit le billetiste. Mouais, j'ai comme la sensation d'être définitivement la poule aux oeufs d'or. Courageusement, je garde pour moi mes impressions et m'installe dans mon coin.
Le paysage s'égrène, rien de passionnant, une route d'aéroport en somme. Nous arrivons enfin, je reconnais les lieux. J'avais un peu peur d'avoir tout oublié, un an c'est long pour une mémoire. Tout était là pourtant, odeurs, sensations, cris, tout remonte à la surface, comme une impression de chez-soi, je suis de retour.
J'atteins enfin la médina, le trajet est long et entrecoupé de passages difficiles à cause des souks. La vieille ville de Tunis est d'une beauté étourdissante au sens propre, ses rues sont pavées et étroites, les étalages des marchands apostrophant le chaland en occupent la moitié et il est malaisé de s'y frayer un chemin.
On se laisse porter par le courant, et nul doute que Piaf a eu une pensée pour cette ville en chantant La Foule.
Enfin, après mille bifurcations sans doute inutiles, la voici, la tant désirée auberge de jeunesse. Sa gigantesque porte bleue, dans un quartier plutôt calme de la médina, impressionne et rassure en même temps. Et je n'avais pas encore franchi son seuil.
L'auberge de Tunis est, aux dires de tous, la plus belle du pays : installée dans une ancienne Dar richement décorée de mosaïques, elle possède une cinquantaine de lits qui s'organisent autour d'un patio baigné de la lumière astrale issue de sa coupole-verrière. Un lieu calme et imposant où l'on vient trouver le repos et un contact humain plus naturel après l'assourdissante expérience de la médina.
Je rencontre Jalloun qui m'encaisse mes deux nuits : Tu es Algérienne? Oui. Tu peux le prouver? Je n'ai que mon passeport français. Tant pis pour toi, tu paieras 8 DT au lieu de 7. Viens, je te présente aux autres.
Les autres, c'est Ellen, une stagiaire allemande qui s'intéresse à la culture arabe mais qui n'est pas satisfaite de son stage à l'auberge, elle n'a que des tâches ménagères à effectuer. Je me dis qu'elle n'a pas tout perdu, qu'elle expérimente la condition féminine en Tunisie, mais une fois de plus je me tais.
Un jeune homme me regarde, l'air goguenard mais curieux aussi. Alexis, c'est son nom, semble tout à fait à son aise ici. Ca fait dix jours qu'il est là ; dans une auberge de jeunesse, c'est un peu comme faire partie des meubles. Lui aussi est stagiaire, mais dans une banque, il doit donc se lever à 5 h du matin, horaires d'été obligent. On accroche tous d'emblée, ce qui permet d'avoir de la compagnie là où on pensait être seul au monde.
Dans la chambre que je partage, Laura et Jenny mettent un terme à leur tour tunisien et continuent vers l'Egypte. Je les envie un peu d'être deux pour partager ces moments et je regrette à l'avance cet endroit si chaleureux. Je sens déjà que, pour les deux seules nuits que je vais y passer, cette auberge va m'apporter rencontres et souvenirs impérissables.
Soudain, une horde de 31 Français de chez france Telecom viennent interrompre mes rêveries : ils sont affamés, se jettent sur le buffet et entament une série de jeux bruyants et joyeux. Nous sommes déjà au lit mais c'est sympathique, c'est aussi ça les nuits en auberge.

MAIL TO : Tout le monde
Coucou tout le monde!
Désolée pour ceux qui ont essayé de me joindre mais mon portable (comme d'habitude) ne fonctionne pas en Tunisie ; d'ailleurs, Alex, si tu voulais appeler Orange et les insulter pour moi, je t'avoue que je ne serais pas totalement contre...
Alors, je suis très bien partie et arrivée, c'est déjà un bon point. Les funky stories from Tunisie ont bien sûr commencé dès l'aéroport : arrivée à 18h40 comme prévu, je décide de prendre le bus pour tunis : un taximan débarque pour me proposer de m'emmener, je refuse "J'attends le bus, merci, c'est bon". Là, il regarde sa montre et l'air de rien balance, c'est comme tu veux, le prochain est à 22 h. Franchement, il aurait pas poussé le bouchon si loin, y aurait peut-être eu moyen que j'hésite, mais là, je crois qu'il a fait imploser les limites du pipeau. Evidemment le bus est arrivé trente secondes plus tard.
Sinon, l'auberge de jeunesse est très belle et les gens super sympa. Elle est en plein coeur de la medina, c'est une ancienne Dar entièrement décorée de mosaïques et construite autour d'un patio où l'on prend les repas, cafés ou un jus. Elle est réputée pour être la plus belle de Tunisie, et donc aussi la plus chère, 8 DT la nuit avec petit déjeuner, c'est à dire 6 euros... L'arnaque totale en somme. A ce rythme là, je sais pas si je vais pouvoir survivre longtemps ici.
Bref, finalement cette première journée s'est déroulée bien mieux que prévu, en définitive je suis même plutôt contente d'être là, donc jusque là...


Hommes au caf� Posted by Picasa


Artisanat Posted by Picasa


Dromadaires  Posted by Picasa


Matmata  Posted by Picasa


D�sert rocailleux Posted by Picasa


Auberge de jeunesse � Tunis Posted by Picasa